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10 octobre 2010

La nature helicoìdale du jeu vidéo

Certaines formes d’arts peuvent être consommées de manière hélicoïdale. Telle une spirale qui devient de plus en plus étroite, notre compréhension de cette pièce à première vue est une compréhension au sens très large, très littérale. Par contre, en revisitant cette pièce d’art, nous apprenons à l’analyser sous une autre lumière. Ayant compris le message général, la personne peut donc centrer son attention sur des éléments précis, ou découvrir des messages cachés.

Les poèmes de Dante se lisent ainsi. À la première lecture, si nous lisons le texte au sens littéral, nous ne percevons qu’un amalgame de descriptions qui ne semblent pas connectés. C’est en relisant certains passages qu’on se rend compte que le texte est remplis de sous-entendus. Bref, c’est à votre cerveau de déceler les éléments du texte, car ils ne sont pas immédiatement apparents.

La littérature n’est pas le seul médium artistique qui se consomme ainsi. Par exemple, le récent film « Scott Pilgrim VS the world » est rempli des références des années 80, la plupart subtiles. Il faut regarder le film plusieurs reprises pour toutes les trouver.


Mais concentrons-nous sur le jeu vidéo. Il existe plusieurs raisons de jouer à un jeu plus d’une fois. Dans un jeu d’arcade tel Star Fox, Ikaruga ou Pacman, l’obtention d’un plus haut score augmente la durée de vie. Dans un jeu de course, battre notre temps est un potentiel incitatif. Dans un jeu de combat, certains d’entre nous jouent intensivement pour augmenter leurs talents compétitifs. Bref, il existe beaucoup de raisons pour rejouer un jeu.

Par contre, comment expliquer la rejouabilité d’un jeu de rôles traditionnels ou un jeu d’aventure? Ce sont des jeux répétitifs, et dès que nous savons comment avancer, il n’y a plus de surprise. Pourtant, j’ai complété « The Legend of Zelda Ocarina of Time » plus d’une dizaine de fois. Le désir de revenir vers ce jeu est l’objet de mon article; j’y ai joué de manière hélicoïdale. Chaque joute a tourné mon attention vers un élément du jeu qui m’avait autrefois échappé. Par exemple, quand Link est jeune, le marché d’Hyrule regorge de vie. Malgré les limitations de la Nintendo 64, nous pouvons comprendre le message : C’est le cœur de la nation; l’endroit le plus protégé d’Hyrule, vu la présence des gardes dans les entrées. Le château est tout prêt, et les gens vivent leurs vies sans se soucier du monde extérieur. Bref, nous-mêmes, nous nous y sentons en sécurité. Quand Link brandit la Master Sword, Gannondorf arrive, s’empare de la Triforce et Link tombe dans un sommeil profond. Il se réveille sept ans plus tard et dès que nous quittons le temple du temps, nous apercevons que l’état du monde à changé. Le marché autrefois plein de vie est était maintenant complètement dévasté, et des zombis (Redead) erraient les rues.


Ma réaction initiale était de voir cette situation au niveau littéral. La ville était dévastée à cause de Gannondorf qui avait pris le pouvoir du royaume, et le monde avait besoin d’un héros. Mais il y avait plus à comprendre de cette choquante transition. En y rejouant, j’ai réalisé que d’avoir ouvert la porte du temps avait en fait ouvert le chemin pour que Gannondorf prenne possession de la Triforce et du royaume. Certes, cette situation aurait été inévitable, car Gannondorf aurait été prendre les pierres par lui-même. Par contre, nous avons accéléré le processus. À notre éveil, nous voyons la ville dévastée et les redeads. Mais ce ne sont pas que des monstres. Les habitants ont tous disparût, et les redeads sont d’apparence anthropomorphiques. Bref, le message caché selon moi est que les zombis qui nous attaquent en ville sont probablement ces personnes que nous avions l’habitude de voir dans la ville. De plus, quand nous quittons la ville, et que nous allons au Lon Lon ranch ou dans Kakariko village, une seconde partie m’a permis d’apprécier la profondeur de l’environnement de peur qui plane dans ces régions éloignées du centre du royaume. Bref, rejouer m’a donné plus de raisons d’apprécier le jeu.

Un exemple plus général sont les RPGs traditionnels. Souvent, les japonais on tendance à mettre une grande emphase sur le développement des personnages. Il est possible de jouer une partie complète en se concentrant uniquement sur un personnage en particulier et de déceler des éléments de sa personnalité. Par exemple, à première vue, Frog de Chrono Trigger est un personnage avec de la classe. Je l’ai défini ainsi. Et en effet, il a de la classe, mais il est aussi un personnage avec un passé et un présent douloureux. C’est un être brave malgré avoir toutes les raisons d’abandonner.

Mais plus de profondeur n’est pas nécessairement relié à l’histoire d’un jeu. Par exemple, j’ai récemment terminé Demon’s souls avec un combattant. J’ai recommencé une partie avec un mage, et l’expérience de combat était si différente que de refaire les mêmes tableaux donne tout de même une expérience nouvelle. Certains jeux regorgent aussi de secrets, d’endroits encore inconnus. Parfois une première partie est jouée un peu rapidement, et une seconde partie permet une exploration plus exhaustive.

Bref, selon moi, la meilleure manière de savourer un jeu est d’une manière hélicoïdale. Un jeu vidéo a souvent plusieurs niveaux d’interprétations et parfois, une seconde visite permet d’approfondir notre connaissance de cet univers.

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